Donation-partage : la Cour de cassation se montre plus sévère

Thumbnail [16x6]

Outil apprécié pour préparer sa succession et limiter les conflits familiaux, la donation-partage permet de distribuer ses biens de son vivant en figeant leur valeur au jour de l’acte. Mais un arrêt de la Cour de cassation rendu en juillet 2025 rappelle une exigence stricte : aucun lot ne peut être indivis entre héritiers, sous peine de requalification en simple donation.

Donation-partage ou donation simple : une différence majeure
La donation-partage consiste à attribuer à chaque héritier un lot déterminé (somme d’argent, bien immobilier, titres financiers…) en répartissant de façon équilibrée le patrimoine du donateur. Sa principale vertu est de figer la valeur des biens au moment de l’acte, évitant ainsi d’avoir à réintégrer leur valeur réactualisée lors du règlement de la succession.
 

À l’inverse, dans une donation simple, les biens donnés sont réévalués au jour du décès pour établir le partage. Exemple : si un enfant a reçu 50 000 € à un instant T, valorisés à 100 000 € au jour du décès, ce montant réévalué est réintégré dans la masse successorale, ce qui modifie le partage final.
La donation-partage permet donc de sécuriser la transmission et d’éviter des tensions entre héritiers. Mais encore faut-il respecter ses conditions juridiques.

La Cour de cassation interdit les lots indivis
Dans son arrêt du 2 juillet 2025, la Cour de cassation a confirmé que la donation-partage suppose « une répartition matérielle des biens entre les descendants ». En clair : chaque héritier doit recevoir un lot propre, sans indivision avec un autre.
 

Cette précision, qui prolonge une jurisprudence de 2013, ferme la porte aux situations où une partie du patrimoine aurait été attribuée en indivision (par exemple une quote-part indivise d’un bien immobilier) en plus d’un lot individuel. Désormais, un seul lot indivis suffit à faire requalifier l’ensemble de l’acte en donation simple.
 

Les conséquences peuvent être lourdes : la requalification entraîne la réintégration de la valeur actualisée des biens dans la succession, ce qui peut profondément modifier la répartition et rouvrir des contentieux entre héritiers.
 

Il existe toutefois une exception : lors d’une transmission intergénérationnelle incluant les petits-enfants, ces derniers peuvent recevoir une quote-part indivise.

Une stratégie patrimoniale à manier avec précaution
La décision rappelle aux familles et aux notaires l’importance d’un formalisme rigoureux. Trois conditions doivent être réunies :
• Tous les héritiers doivent être parties à l’acte et recevoir un lot ;
• Tous les donataires doivent être d’accord ;
• Chaque lot doit être individualisé, sans indivision, sauf dans le cas spécifique des transmissions intergénérationnelles.
 

Malgré ces contraintes, la donation-partage reste un outil efficace pour anticiper la succession, éviter des conflits et bénéficier d’un cadre fiscal favorable : chaque parent peut transmettre 100 000 € par enfant tous les 15 ans, en franchise de droits.
 

La prudence s’impose cependant, notamment lorsqu’un patrimoine se compose d’un seul bien immobilier difficilement divisible. Dans ce cas, d’autres solutions comme la vente préalable ou le recours à l’assurance vie peuvent être plus adaptées.